Élections européennes 2019 : cataclysme en prévision ?

Jeudi, 23 Août 2018

Premières élections après l'officialisation de la défection britannique, les européennes de 2019 nourrissent bien des fantasmes et bien des craintes. Alors que l'orage de la crise des dettes souveraines semble être passé et que la pression migratoire s'est considérablement réduite, la légitimité du projet européen continue de faire l'objet d'attaques plus ou moins virulentes. Dans un paysage politique européen en recomposition, la seule véritable certitude quant à l'issue du vote est celle d'un faible taux de participation. La composition de la législature à venir devrait refléter les nouvelles aspirations, parfois contradictoires, des citoyen-ne-s européen-ne-s. PLS fait ci-dessous le point sur trois tendances qui se dessinent actuellement.

L'abstention, constante du vote des électeurs européens

Entre 1979, date des premières élections européennes au suffrage universel direct, et 2014, le taux de participation aux élections européennes est passé de 61.99% à 42,61%. Si ces chiffres varient considérablement d'un État à l'autre, la baisse continue du taux de participation est un dénominateur commun à tous. Sur les réseaux sociaux, les institutions européennes tentent déjà, si ce n'est d'inverser la tendance, au moins de limiter les dégâts. Le Parlement européen a ainsi fait du réseau social Instagram son canal privilégié pour toucher les jeunes électeur-trice-s : en 2014, 74% des électeur-trice-s français-e-s âgé-e-s d'entre 18 et 24 ans n'avaient pas été voter. Si le phénomène abstentionniste n'est pas unique aux élections européennes, l'extrême faiblesse des taux de participation observés témoigne du désintérêt des citoyen-ne-s pour les affaires européennes.

Un déclin relatif des partis européens traditionnels au profit des populistes et eurosceptiques

Le Parti Populaire européen (PPE, centre droit), devrait péniblement se maintenir en tête du scrutin, les Socialistes et Démocrates (S&D) toujours sur ses talons malgré un nombre de sièges perdus considérable. Le S&D devrait souffrir du départ des eurodéputé-e-s britanniques travaillistes, mais profiter dans une certaine mesure de l'état de grâce actuel dans lequel se trouvent les socialistes espagnol du PSOE. L'Alliance des Démocrates et Libéraux européens (ADLE, centre) espère voir les eurodéputé-e-s français-e-s issu-e-s de La République en Marche venir grossir ses rangs, et ainsi devenir la troisième force politique du Parlement européen. On ignore actuellement si le parti du Président Macron rejoindra l'ADLE, ce qui selon plusieurs observateurs constitue une alliance naturelle, où s'il tentera de former son propre groupe politique une fois au Parlement. Dans l'ensemble, ces groupes politiques devraient perdre des sièges au profit de divers partis plus ou moins eurosceptiques, tels que le Front National, le Mouvement Cinq Étoiles ou encore l'Alternative für Deutschland.

La transnationalisation de la politique européenne, pour le meilleur et pour le pire

Le déclin des grands groupes politiques européens doit être replacé dans le contexte plus général du délitement des partis traditionnels, observable dans nombre de pays européens. Bien que le Parlement européen ait rejeté le projet d'attribution des sièges laissés vacants par les britanniques à des eurodéputé-e-s issus de listes transnationales, des mouvements-partis ambitionnent de contourner cette difficulté en concourant dans plusieurs États membres sous un programme européen commun. On citera ici la liste transnationale Printemps européen impulsée par le Democracy in Europe Movement 2025 (DiEM25), mouvement co-fondé par l'ancien Ministre des finances grec Yanis Varoufakis, ou encore le nouveau parti transnational Volt. Il est pour l'instant difficile de prédire la performance électorale de ces nouveaux-venus. À titre indicatif, Génération.s - le parti de Benoît Hamon, qui incarnera en France la liste Printemps européen, n'est pour l'instant crédité que de 3% des intentions de vote. Si ces partis-mouvements remettent en question les usages des europartis établis, ils ne doivent pas être pour autant considérés comme une menace au projet européen mais plutôt comme une tentative de revitalisation citoyenne de la politique européenne. Les pro-européens ne sont cependant pas les seuls à adopter des stratégies de transnationalisation de la politique européenne. Le mouvement Generation Identity, qui plaide activement pour une Europe des États-Nations, a ainsi développé son réseau européen en Allemagne, en Autriche, en France, en Italie, en Irlande et au Royaume-Uni. S'il n'a pas à ce jour d'ambitions électorales avérées, sa stratégie fait craindre une véritable union des populistes et nationalistes européens, qui jusqu'ici semblent avoir peiné à se rassembler, comme en atteste leur fragmentation au sein de différents groupes parlementaires européens.