Enfin une protection pour les lanceurs d’alerte !

Mercredi, 9 Octobre 2019

« Personne ne devrait risquer sa réputation ou son emploi pour avoir dénoncé des comportements illégaux » a déclaré la ministre finlandaise de la Justice, Anna-Maja Henriksson, avant l’adoption d’une directive assurant une immunité juridique aux lanceurs d’alertes par les ministres de l’UE. Une protection inédite et attendue dans une Europe jusque-là divisée sur la question du statut des lanceurs d’alertes.

Les fuites à propos de scandales financiers, sanitaires, ou environnementaux, par le biais des médias, se sont multipliées ces dernières années. A l’origine de ces révélations, des lanceurs d'alerte ou whistles blowers qui décident d’alerter la société d’une fraude de grande ampleur ou d’un danger imminent. Bien souvent, en enfreignant la loi dans le même temps.  Or, jusqu’à présent, les dispositifs de protection des lanceurs d’alerte s’avèrent disparates, faibles voire inexistants, les exposant alors à des poursuites judiciaires.

C’est notamment le cas dans l’affaire des LuxLeaks où les deux lanceurs d’alertes, Antoine Delcourt et Raphaël Halet ont été condamné par la justice luxembourgeoise. Alors qu’ils avaient révélé un vaste accord de dérogation fiscale, signée entre le  gouvernement luxembourgeois et de cabinets d’audits, les deux anciens employés de la société PricewaterhouseCoopers ont été poursuivis pour vol, violation du secret professionnel et du secret des affaires. A la suite d’une bataille judiciaire, Antoine Delcourt a finalement obtenu le statut de lanceur d’alerte et s’est fait relaxé. A contrario, son collègue n’a lui pas obtenu gain de cause, la cour de cassation luxembourgeoise ayant estimé qu’il n’avait pas divulgué de documents « sensibles ».

La reconnaissance du statut de « lanceur d’alerte »

Si cette protection est unique et novatrice, elle s’inscrit dans un cadre juridique limité et contraignant.  En effet, pour qu’un lanceur d’alerte obtienne une immunité, il faut d’abord qu’il respecte un certain nombre de conditions : avoir préalablement signalé le problème en interne, ne pas avoir obtenu de réponse et, en dernier recours, le dévoiler à la presse. La seule dérogation possible s’avère être en cas de péril imminent ou face au risque de représailles.  

L’autre faille du dispositif de protection est contenue dans son champ d’action. Et ce parce que les lanceurs d’alertes ne seront protégés que dans le cadre d’une infraction faite au droit communautaire. Cette condition créé des zones grises et notamment dans le domaine de l’évasion fiscale.

Par ailleurs, cette protection sera assortie d’une obligation pour les entreprises et pouvoirs publics de répondre aux rapports des lanceurs d’alerte dans les trois mois. L’objectif sera à la fois de sécuriser les lanceurs d’alerte et d’en limiter le nombre, en assignant une responsabilité aux entreprises et pouvoirs publics.

Les nouvelles règles devraient être transposées dans les 2 ans.