Migrants

Accord Rwanda-UE : vers un désengagement croissant de l'UE dans l'accueil des migrants ?

Vendredi, 13 Septembre 2019

Le 10 septembre dernier, Paul Kagamé, président du Rwanda, a annoncé avoir signé un accord avec le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés et l’Union Africaine dans lequel il s’engage à accueillir des migrant-e-s coincé-e-s en Libye sur son territoire. Cet accord comporte une ambivalence, oscillant entre l'opportunité pour les réfugié-e-s de sortir de l’enfer libyen et le retrait croissant de l’Union Européenne dans les politiques migratoires.

Des conditions d'accueil insupportables

Alors que les passeurs réclament toujours plus d’argent pour la traversée quand la moitié des embarcations sont ramenées sur le rivage par les gardes côte, des dizaines de milliers de réfugiés se retrouvent souvent coincés sur le territoire libyen. Abandonné-e-s par l’Union Européenne, iels sont alors à la merci des milices, qui perpétuent viols, actes de torture et autres crimes en toute impunité. Entassé-e-s dans des centres de détention surpeuplés, iels sont aussi exposé-e-s à toutes sortes de maladies et notamment la tuberculose.  

La situation n’est pourtant pas nouvelle. Depuis 2017 et le reportage de CNN, l’Union Européenne a parfaitement connaissance des cas d’esclavages, de mutilations ainsi que des crimes perpétrés sur ces populations fragiles. Pour autant, les promesses d’évacuations urgentes n’ont pas été tenues et plus de 50 000 demandeurs d’asiles attendent toujours une solution, coincés sur le territoire libyen.

Un accord historique qui questionne les intentions de l’UE

Avec cet accord inédit, le Rwanda s’engage à accueillir près de 30 000 réfugié-e-s sur son territoire. Logés dans différents centres à travers le pays, les migrant-e-s pourront effectuer des demandes d’asile pour l’Union Européenne, à distance.

Cette aide à l’UE est conditionnée par une rétribution financière, encore non chiffrée. Au-delà de l’aspect financier, cette sous-traitance dans l’accueil des réfugié-e-s questionne puisqu’elle ne garantis aucunement l’obtention du droit d’asile, seule manière de sortir de l’errance. D’ailleurs, aucun dispositif n’est encore prévu en cas de refus de la part de l’UE.

Cet accord, presque passé sous silence par la presse européenne, interroge sur la conduite des futures politiques migratoires de l’UE, et ce notamment après la création du portefeuille « protéger notre mode de vie européen ». Il faut alors se demander si l’enjeu n’est pas de déléguer pour mieux éloigner les réfugié-e-s plutôt que leur assurer une réelle protection. Ainsi, alors que le Rwanda ouvre ses portes aux migrant-e-s, l’Union Européenne, elle, referme les siennes encore un peu plus.